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10 mars 2013 7 10 /03 /mars /2013 02:07

« Depuis 25 ans on explique aux français qu’on ne peut rien.

Je pense pour ma part que l’on peut tout »

 

Nicolas SARKOZY (1955) – Ancien président français et de bonne volonté

 

 

« Notre modèle républicain est en crise. Cette crise est avant tout morale. Au cœur de celle-ci il y a la dévalorisation du travail. Le travail c'est la liberté, c'est l'égalité des chances, c'est la promotion sociale. Le travail c'est le respect, c'est la dignité, c'est la citoyenneté. Avec la crise de la valeur travail, c'est l'espérance qui disparaît. Le travail est dévalorisé, la France qui travaille est démoralisée. Je veux être le président d'une France qui remettra le travailleur au cœur de la société. Je veux proposer aux français une politique dont le but sera la revalorisation du travail ».

 

Cet extrait est issu du discours de la Porte de Versailles de Nicolas Sarkozy du 14 janvier 2007. Un grand moment. Le début de sa campagne présidentielle victorieuse, celui du « J’ai changé ». Le moment où il va naturaliser sa présence et dissiper les doutes sur sa légitimité. Il est le candidat normal. Il est indispensable. Il est irremplaçable. L’électeur doit ressentir que le candidat par sa personnalité plus que par ses propositions est essentiel et que l’avenir passe forcément par lui.

 

Nicolas Sarkozy doit se présenter sous un rôle vraisemblable par rapport aux attentes. Il est alors surtout connu pour son hyperactivité et cette nervosité peu valorisante qui traduisent un goût pour l’action et une énergie qui bien canalisées seraient utiles. Le volontarisme sera son argument de vente principal. Il lit les attentes de la France de 2007 comme celles d’un pays qui désire de l’action et qui en a assez de l’immobilisme défaitiste de la classe politique. Il gagnera.

 

Comme le note Raoul Girardet sur l’homme providentiel, « tout processus d’héroïsation implique une adéquation entre la personnalité du sauveur virtuel et les besoins d’une société à un moment donné de son histoire. Avec lui, grâce à lui, l’après ne sera plus comme l’avant ». Cette rhétorique a servi au cadrage du candidat. En période de crise, elle fait du candidat une solution incontournable. Le manque de contrôle de soi incarne alors le désir de conquête.

 

Le volontariste croit en la volonté et l’homme providentiel est envoyé par la providence. Les deux vont se confondre dans la personnalité de Nicolas Sarkozy. La France de 2007 n’est pas encore en crise mais il utilisera la rhétorique à contre-pied, moins pour se décrire comme un sauveur que pour attirer l’attention de l’auditoire sur ses arguments. Les mots ne sont pas là pour leur sens sémantique, mais pour leur rôle de structuration. C’est du second degré.

 

Nicolas Sarkozy dénonce la crise du travail. Il dramatise pour mettre en scène et éveiller l’émotion du public. L’essentiel étant son intervention, celle du « je », prononcé une fois toutes les 17 secondes et 17 fois tous les 100 mots lors de ce discours. Il incarne la rupture entre la description et l’action, bien qu’il dise « Je veux » et non « Je ferai ». Sa volonté mène son action et sa résolution amène la solution. Il donne l’illusion de déjà agir et retourne le stigmate.

 

Le candidat entre en scène après un avant dénigré ce qui le rend désirable et l’associe à un après qui veut aller de l’avant. La situation peu sereine appelle l’apaisement. Le candidat est la solution à la crise. Un homme neuf. Il ne propose pas de solution car il est la solution. Il noie ses propositions dans une litanie technique car l’essentiel est ailleurs. Il se suffit à lui-même. Il met sa volonté au centre de son action. Il est volontiers volontaire. Il sera celui qui fera.

 

Le public se sent presque obligé d’accepter la proposition de ce candidat bénévole, qui face à la démission de la classe politique se sacrifie pour devenir président. L’explosion du « je » est son entrée en jeu. Cette volonté d’être président est cohérente avec son profil : il a toujours voulu l’être. Mais il se propose plus qu’il ne s’impose. Son ambition est au service de la France. Son volontarisme fait de son hyperactivité la solution idéale pour résoudre la crise du pays.

 

Il n’est plus agité. Il agit, même s’il confond le dire et le faire. « L’homme providentiel apparaît toujours comme un lutteur, un combattant. Toujours menacé, toujours arc-bouté au bord du gouffre, il refuse de se soumettre au destin. C’est d’abord par sa hardiesse que s’impose le meneur, par sa puissance de récusation et de remise en cause. C’est avec une sorte d’avidité farouche qu’il se rue vers l’aventure, la gloire, la puissance : Que tenterai-je ? Sur quoi me jetterai-je d’abord ? Il ne s’appartient plus, il nous appartient ». Il se providentialise.

 

« Un adolescent vagabond, errant, incertain, découvre brusquement qu’il est promis à un grand destin. Vers lui il sent monter l’attente de tout un peuple las de l’inertie, de la médiocrité, et de la banalité quotidienne. Il est devenu quelque chose de plus qu’un homme, une sorte de symbole en qui d’innombrables français ont reconnu ce qu’ils souhaitent pour la France. La réalité, telle du moins que celle-ci est vécue, n’est pas celle de l’abdication d’une volonté particulière au profit d’une volonté étrangère. Elle est celle de la rencontre de deux volontés, ou plus exactement celle du réveil, du ressaisissement d’une volonté léthargique ou dispersée au contact d’une autre volonté, plus forte, plus entraînante, plus conquérante ».

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commentaires

R
ça rapelle de bons souvenir!
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