« Les gagnants trouvent des moyens, les perdants des excuses »
Franklin ROOSEVELT (1882-1945) – Ancien président américain et haïssant la défaite
Mauvais anniversaire. Le 10 mai 1981 est mort un 16 mars. C’était en 1986, et la droite reprenait le pouvoir à la gauche en gagnant les élections législatives. Mais le socialisme est une idée qui a fait son chemin, pour reprendre un vieux slogan vendeur de François Mitterrand. Ce dernier a au congrès d'Epinay de 1971 pris le contrôle du Parti socialiste, nouvellement crée sous l'égide d'Alain Savary suite à la pénible agonie de la SFIO, la vieille maison de Léon Blum.
Les socialistes ne remercieront jamais assez Mitterrand, pétainiste issu d’une famille bourgeoise conservatrice adopté par le peuple de gauche et qui a su si bien lui rendre sa fierté. Son obstination a fait du PS l’une des deux grandes forces politiques du pays. Il est surtout le seul président de la république qu’ait connu la gauche sous la Vème République, après deux tentatives avortées en 1965 et 1974. En 1981, Vincent Auriol trouvait enfin son successeur.
L’histoire est connue mais on a toujours autant de plaisir à la raconter. Porté par son ambition de destin national, le natif de Jarnac a fait d’un parti hagard une machine de guerre grâce à une tactique simple : devenir la première force de la gauche puis devenir la première force du pays. La première tâche fut accomplie dès 1978 grâce au programme commun de 1972 qui mit hors jeu le PCF à perpétuité. La deuxième tâche le fut ce fameux 10 mai 1981.
Il avait prévenu : « Je veux que nous prenions le pouvoir ». Et grâce à lui, le PS est devenu une machine à gagner. Force est de reconnaître que les générations suivantes ne lui ont pas toujours rendu l’hommage qu’il méritait. On repense au droit d’inventaire de Lionel Jospin ou aux propos mesurés de François Hollande sur Tonton. Mais le 30ème anniversaire du 10 mai, le 15ème de sa mort et celle de sa femme Danielle ont permis d’honorer de nouveau sa mémoire.
Entre Ségolène Royal qui prétend être sa fille (une autre), Martine Aubry qui réécrit une « Lettre aux français » et François Hollande qui relit des « Propositions aux français », on voit bien que le passé n'est pas totalement dépassé. Mais à trop juger l'héritage, on en finit presque par ne plus juger les héritiers. Voilà le problème. Si on s’en tient à la réalité froide, on notera avec cruauté qu’aucun socialiste n'a gagné les élections présidentielles depuis le départ du vieux.
Mais comme François Hollande pourrait y arriver cette année, il faut regarder ailleurs. Car le succès n’efface pas tout et surtout pas les crises internes et les guerres intestines du PS, grand cadavre à la renverse depuis dix ans et le fiasco du 21 avril 2002. Arnaud Montebourg est déjà prêt en cas de défaite à mener la rénovation du parti comme au bon vieux temps du congrès d’Epinay. « La machine à perdre est de retour », disait Jean-Christophe Cambadélis.
Une victoire en 2012 donnera l'illusion d'avoir clôt le chapitre. Mais personne n'est dupe : le parti ne s'est uni que pour les besoins d’une élection et pour faire bonne figure. Car c'est en réalité une machine à perdre et un poids mort pour son candidat, comme en 2007 avec Ségolène Royal. D’ailleurs, comme Jospin en 2002 et Mitterrand en 1988, Hollande n'a pas jugé nécessaire de prendre appui dessus pour mener sa campagne du changement.
Peu de choses ont changé au PS, le hold up du congrès de Reims de 2008 rappelant les pires heures du congrès de Rennes de 1990. A l'UMP au moins, le parti est une machine de guerre électorale qui porte son leader, pas un passager clandestin. Elle fait la sélection naturelle des ambitions, Xavier Bertrand et Alain Juppé le savent bien. Car comme le dit Laurent Fabius, « Une victoire c'est un chef, une équipe et un projet ». Alleluia.