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26 janvier 2013 6 26 /01 /janvier /2013 07:50

« L’opinion publique c’est ce que mesurent les sondages »

 

Jean STOETZEL (1910-1987) – Sociologue français et premier sondagiste

 

 

Il y a mille manières de vivre la démocratie, et à peu près autant de mauvaises de la faire vivre. La démocratie d’élection est la plus connue et la plus critiquée : voter c’est forcément être pris pour un con. La démocratie de manifestation est la plus visible et la plus virulente : gueuler c’est facile mais peu constructif. La démocratie d’implication est la plus noble et la plus rare : militer c’est s’engager or plus personne ne veut prendre de risques. La démocratie d’opinion est la plus évasive et pourtant la plus puissante : elle nous gouverne et gouverne les gouvernants.
 
Les français sont actuellement inquiets pour leur avenir et pour celui du pays, car ils ne comprennent pas la politique du gouvernement et regrettent son absence de ligne directrice. Persuadé qu’il allait devenir populaire grâce à sa méthode et à sa cohérence, François Hollande est déjà au même niveau d’impopularité que Nicolas Sarkozy à son plus bas. Pour être réélu en 2017, il faudrait que la situation économique mondiale s’améliore et déteigne sur la France ou que les français en aient marre pour une fois de l’alternance et que la droite soit pire encore.
 
Quand on gouverne, il ne suffit pas de prendre les bonnes décisions. Même si c’était le cas du gouvernement socialiste, il faudrait encore savoir les expliquer et leur donner du sens. Ce n’est qu’en donnant des objectifs au peuple qu’on le rend optimiste et qu’on lui fait accepter les mesures les plus impopulaires. De l’austérité à la fin des 35 heures en passant par la baisse du pouvoir d’achat. Mais au lieu d’être narrateur de l’histoire en marche, le président en France suit le peuple plus qu’il ne l’incite à le suivre. C’est un homme politique, pas un homme d’État.
 
Il attend l’avis des gens avant de lancer ou non une réforme et cet avis lui est donné par les sondages d’opinion. Dans la démocratie d’opinion, le pouvoir se remet rarement en jeu aux élections mais le peuple est quand même écouté grâce aux instituts privés qui disent la météo. Girouette croyant donner le sens du vent, il ne fait que le suivre et change d’avis comme de cabanon pour un jour se fixer et se rouiller sur l’une d’elle au mépris de l’adaptation à la réalité. Pour faire ses stratégies, Patrick Buisson abusait ainsi des sondages et ça a fini par être suspect.
 
Le drame c’est que l’opinion démocratique sur laquelle repose entièrement cette idiote démocratie d’opinion est versatile, volatile, puérile et futile. Elle n’écoute que ses foucades et a des lubies inquiétantes que ses chefs considèrent avec beaucoup trop d’attention. La société de compassion dans laquelle nous vivons ne supporte pas le malheur. Le sien est une honte, celui des autres est un scandale. Alors le moindre fait divers devient une tornade médiatique pour ce pays à fleur de peau, et les ministres se croient obligés de soumettre une loi à l’assemblée.
C’est cette démocratie d’opinion qui nous mène à la catastrophe et il est temps d’en finir avec elle. Les réformes qui n’arrivent jamais parce que trop impopulaires. Les mots qui ne sont jamais prononcés parce que trop chargés de sens. Les affaires qui ne sont jamais révélées parce que le mensonge est devenu une sale habitude. Le conflit avec l’opinion démocratique est pourtant nécessaire, voire salutaire. A condition de savoir le gérer : pour ça, il faudrait redonner de la crédibilité à la parole politique et de l’importance à l’avis de l’élu sur l’avis de l’électeur.
L’opinion publique est cadrée par des idées communes, qui donnent sens aux situations rencontrées par les individus. Mais rien n’est jamais figé car tout est affaire d’interprétation. Si un élu politique dit que c’est « noir », ses électeurs qui croyaient que c’était « blanc » tourneront leur veste pour peu qu’il soit respecté et fasse autorité. Il oriente et influence la perception de ceux qu’il représente. C’est son métier. Il est ainsi temps de revenir à la démocratie d’élection.   
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