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12 mars 2012 1 12 /03 /mars /2012 07:57

« Le politique qui réussit le mieux est celui qui dit le plus souvent

et le plus fort ce que tout le monde pense »

 

Théodore ROOSEVELT (1858-1919) – Ancien président des Etats-Unis et perroquet bavard

 

Jean-Luc Mélenchon n’est pas une révélation dans cette campagne. Les connaisseurs l’avaient déjà repéré. Ministre discret (et heureusement vu ce qu’il dit aujourd’hui) de Lionel Jospin, socialiste pendant 25 ans, il s’est surtout révélé et rebellé lors du référendum sur la constitution européenne de 2005. Il était farouchement contre, et il l’a gueulé sur tous les toits. Les gens ont fini par entendre le boucan et par se réveiller, et le « non » a gagné.

 

On comprend que François Hollande n’ait pas regretté son départ du PS en 2008. Mélenchon a voulu voler de ses propres ailes. Et pour ne pas battre de l’aile, il devait faire son trou à la gauche du PS. Ce qu’il fit avec son Parti de gauche, en gagnant un joli mais discret succès aux élections européennes de 2009, masqué par le trompe-l’œil des écologistes.

 

Il n’y a qu’à l’ombre qu’on y voit clair : le tribun a depuis poussé un peu plus dans la tombe un PCF obligé de se rallier à sa candidature et qui avait déjà bien creusé son trou. Les deux partenaires seront pour une élection camarades mais néanmoins amis.

 

C’est alors que Jean-Luc Mélenchon a eu une révélation. Bon pied bon œil, il a vu qu’il y avait quelque chose à faire avec le vote protestataire, jusqu’ici dominé sans partage par le FN depuis la chute du mur de Berlin. Il a donc fait le pari d’ouvrir sa gueule plus grand et de gueuler plus fort que la famille Le Pen, et il a réussi à réduire au silence la semi-démente et à faire dire des conneries au vieux. Chapeau l’artiste, on applaudi le retour de Georges Marchais.

 

Car la stratégie de Mélenchon est simple. Même s’il n’en appelle pas quand même aux « masses laborieuses », il se met du côté des plus modestes et il défend leur voix. Il porte la parole des richesses pauvres, d’autant plus facilement que c’est lui qui écrit les textes et qu’on ne leur a pas demandé leur avis. Il sait tout, et il compte bien faire la leçon aux puissants et aux politiciens de pacotille qui méprisent le peuple ou copient son idée de taxer les riches.

 

Il n’y a que les yeux qui rendent aveugles. Alors ouvrons l’œil - et le bon - et ne mélangeons pas tout. Malgré le succès populaire que rencontre sa campagne, Jean-Luc Mélenchon n’est jamais qu’un révolté enragé qui éructe la bave aux lèvres plus fort que les autres ce que le salarié moyen pense à demi-mots les soirs de déprime au comptoir du bistrot autour d’un bon demi. D’accord le système est pourri. Maintenant qu’est-ce qu’on fait ?

 

La vérité, c’est qu’il est facile de faire croire que l’on est un chevalier blanc qui préfère avoir raison seul que tort avec la majorité. Surtout quand on n’aura jamais à affronter la réalité. La vérité c’est qu’il est facile de se comparer aux plus grands révolutionnaires quand on fait de la révolte d’opérette ou du Che Guevara de salon. Comparaison n’est pas raison, Mélenchon n’est pas Mao ni Thorez. La vérité c’est qu’au pays des aveugles les borgnes sont rois.

 

Il n’y a plus de grandes gueules alors on se contente du premier gueulard venu. Comme d’habitude, on en a fait un peu beaucoup. On a perdu le sens de la mesure, mais cela fait bien longtemps que plus personne n’a le compas dans l’œil. Mais si chacun reste trop aveugle ou aveuglé pour voir que Mélenchon n’est que le candidat d’une élection, alors frottons-nous les yeux et mettons-y de la poudre dessus, puisque nous sommes tous devenus myopes.

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7 mars 2012 3 07 /03 /mars /2012 07:55

« Rien n'est jamais perdu tant qu'il reste quelque chose à trouver »

 

Pierre DAC (1893-1975) – Humoriste français et ne se déclarant jamais vaincu

  

    

   

Tout était perdu. La situation ne pouvait donc que s’améliorer. Il y a un mois à peine, Nicolas Sarkozy pataugeait à 8 points d’un François Hollande en état de lévitation, pas encore sur une chaise à porteurs mais aux portes du carrosse qui mène à l’Elysée. Et Zorro est arrivé. L’entrée en campagne du président a été fracassante. Il est rentré dans le lard du socialiste en le traitant de menteur et a dévoilé toutes ses cartes, même les plus vicieuses. Cela rappelle 2007.

 

Ce n’est pas par hasard s’il a choisi comme porte-parole de campagne Nathalie Kosciusko-Morizet, qui en plus de son ton consensuel a l’avantage d’avoir souvent répété à quel point le programme de la première campagne victorieuse de Nicolas Sarkozy était fabuleux. C’était la droite décomplexée, mais les gens voulaient de la droite. Aujourd'hui, ils veulent de la franchise et du langage direct, or François Hollande n’est pas le mieux doté pour les incarner.

 

Il était perdu et il s’est retrouvé. Le président remonte dans les sondages de 1er tour et talonne désormais le candidat socialiste. Il joue mieux son rôle de composition du conquérant ambitieux et énergique que le second rôle du sortant prêt à donner sa tête à couper. Difficile de savoir encore s’il va confirmer en faisant aussi basculer les sondages de 2ème tour pour lesquels il accuse encore un gros retard. Vus les derniers chiffres, il est quand même mal barré.

 

Si l’écart se réduira forcément car c’est trop gros pour être vrai, son entrée en campagne a peu fait bouger les lignes. Mais cette péripétie rappelle à quel point la carrière de Nicolas Sarkozy ressemble à du saut de trampoline : la chute est dure, mais le rebond est surprenant.

 

Soutien du favori Edouard Balladur en 1995, il essuie les crachats des militants RPR après la défaite. Remis en selle par la brusque démission de Philippe Séguin de la direction du parti, il se rétame aux élections européennes de 1999 avant de devenir la star du quinquennat suivant. Elu triomphalement en 2007, il vit des lendemains de noces difficiles et présente un bilan faiblard en 2012. Et pourtant il rebondit encore, prêt à tout oser, y compris à nier en bloc.

 

Histoire de faire quelques cabrioles de plus, au risque de tomber à côté de la plaque. François Hollande voudra démasquer le président-candidat en le mettant face à ses promesses non tenues et à son projet diviseur. L’un est le président actuel, l’autre veut être le prochain.

 

Le candidat-président, voilà la clé du trampoline de Sarkozy. Candidat qui a bluffé les foules en 2007, il a depuis énervé tout le monde comme président. En reprenant ses habits de candidat, il pourrait renouer sa relation avortée avec les français. C’est pourquoi les suiveurs ne donnent pas pour acquise sa défaite. C'est un animal politique qui donne toujours le meilleur de lui-même en campagne et dos au mur, car il a du sens politique et le goût du défi.

 

C’est pourquoi il sera un rival aussi redoutable que redouté. Au final, cette capacité à rebondir est son plus sûr atout face aux remous de la tempête en pleine mer. Non pas que cela lui assure de toujours s’en sortir. Mais les français aiment donner leurs voix aux candidats tenaces et obstinés qui résistent malgré les bas au milieu des hauts et les traversées du désert.

 

Sans cela ils n’auraient pas élu François Mitterrand, leader et loser de la gauche, homme du passé ringard face à la jeune garde du PS. Ni Jacques Chirac, candidat têtu ressuscité en 1995. Il manquait à Nicolas Sarkozy cette preuve qu’il savait souffrir. C'est fait.

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29 février 2012 3 29 /02 /février /2012 09:01

« Les honneurs sans le pouvoir sont les pierres tombales de nos ambitions »

 

Maurice DRUON (1918-2009) – Écrivain français et roi maudit très honoré 

 

 

L'amusant avec les élections présidentielles, c'est que malgré le désintérêt croissant pour la politique qui gagne le pays elles restent un moment de réflexion collective et d'imaginaire partagé. Elles donnent aux français des souvenirs communs, même pour ceux qui ne les ont pas vécues. C'est le cas des bonnes répliques dans les débats (celles de Giscard et de Mitterrand, savoureuses), des soirs de résultats à la télé (1981 et 2002, dans des genres différents) ou encore des slogans accrocheurs (« La force tranquille »).

 

Autre chose très amusante, c'est le fait qu'au-delà des vainqueurs on se souvient aussi des vaincus malheureux, ce qui est rarement le cas pour les autres types d'élections. L'élection présidentielle étant la consécration de toute une vie de sacrifice, le destin de ces rois maudits frappe forcément les esprits des suiveurs qui savent la dureté qu'il y a à vivre sa vie sur un échec. Ils ne seront jamais rois, ayant échoué sans fleurs ni couronnes aux portes de la gloire. On ne les envie pas.

 

Parmi eux, il y a bien sûr Jacques Chaban-Delmas. Le grand résistant, grand gaulliste et porteur de la « Nouvelle société ». Aussi le 1er ministre de Pompidou, grand notable de Bordeaux et grand battu des élections de 1974. Candidat naturel de l'UDR, il est en effet battu dès le 1er tour n'arrivant que troisième largement derrière son principal rival à droite Valéry Giscard d'Estaing (32,6% contre 15,1%), dont le parti des républicains indépendants tenait pourtant dans une cabine téléphonique.

 

La faute à une campagne ratée à tirer sur une ambulance et à la fronde d'un certain Jacques Chirac et son appel des 43. C'est donc un destin manqué, celui d'un grand homme d'État qui terminera sa carrière par des fonctions bien mineures. Un bide semblable à celui de Gaston Defferre à gauche, 5% en 1969 en ticket avec Pierre Mendes France. Lui non plus n'a jamais compris les règles informelles du jeu. Semblable aussi à celui d'un autre maire de Bordeaux, Alain Juppé, jamais président et jamais en position d'être candidat.

 

Il y a ensuite Édouard Balladur, victime en 1995 de la stratégie du favori. Président avant de l'être, il ne se qualifie même pas pour le 2ème tour en arrivant derrière son rival à droite Jacques Chirac (18,6% contre 20,8%), pourtant dans les choux quelques mois plus tôt. Trop sûr de sa victoire, il ne soigna pas assez sa campagne et après avoir largement séduit l'establishment, il ne fit pas de même avec les français.

 

Or le problème du favori, c'est qu'on le prend pour un président. Et comme en France on n'aime ni les vainqueurs ni les présidents, on vote souvent pour l'éternel second que l'on n'attendait pas. La stratégie du favori a nuit à d'autres candidats. Raymond Barre en 1988, Jacques Delors en 1995, DSK en 2012. Quand la pression devient trop forte sur ceux qui n'y sont pas préparés, le bouchon saute et la baudruche médiatique qui voulait forcer la main des français se dégonfle.

 

Enfin, le troisième roi maudit c'est Lionel Jospin. Battu avec les honneurs en 1995, il connait au contraire un grand déshonneur en étant éliminé dès le 1er tour en 2002, ce qui le pousse à se retirer de la vie politique. Après avoir eu droit à son quinquennat, il sortait par la petite porte. C'est le syndrome du sortant, dont le bilan est toujours jugé plus durement que le projet du challenger. Ce fut le cas de Valéry Giscard d'Estaing en 1981 et c'est ce qui pourrait arriver à Nicolas Sarkozy en 2012.

 

C'est aussi la malédiction de la cohabitation, qui profite toujours au président fainéant et pas au 1er ministre qui est sous le feu des critiques, l'exemple de 1988 entre François Mitterrand et Jacques Chirac le montre bien. Mais que ces précédents servent d'exemples et que ceux qui le peuvent s'instruisent de ces expériences.

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