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14 août 2012 2 14 /08 /août /2012 22:54

« Quand j’étais petit, on m’a dit que n’importe qui

pouvait devenir président. Je commence à le croire »

 

Clarence DARROW (1857-1938) – Avocat américain et qui raconte des salades

 

 

Nous sommes en 2007. Nicolas Sarkozy est président de la république et superstar de la politique. Tous les grands leaders de la gauche sont au tapis à commencer par DSK, battu dès la primaire par Ségolène Royal en 2006. Alors qu’il coule des jours tranquilles dans son Riyad de Marrakech, son vieil ami l’inamovible président de l’Eurogroupe Jean-Claude Juncker lui annonce que le poste de directeur général du FMI se libère et qu’il est pour lui. Les jours suivants, Nicolas Sarkozy fait une campagne active en faveur du socialiste qui est facilement élu à la tête de l’institution new-yorkaise. Sans se douter qu’il le remettait là dans le jeu pour 2012.

 

L’ancien président - qui espère aussi revenir dans le jeu grâce à une faveur de ses rivaux - est habitué. Il a replacé Dominique de Villepin sur le devant de la scène en l’attaquant dans le procès Clearstream. Il a remis Jean-François Copé en selle en l’excluant du gouvernement pour ensuite mieux le nommer secrétaire général de l’UMP. Il a ramené Alain Juppé dans le jeu, qui en 2007 n’avait plus aucun mandat national et qui a fini le quinquennat n°2 du gouvernement.

 

Il a brillé alors qu’on croyait qu’il avait sombré. D’abord nommé ministre de la défense en 2010 surtout pour s’occuper des anciens combattants et cela tombait plutôt mal vu son âge, il est devenu ministre des affaires étrangères en 2011 en remplacement de l’imprudente Michèle Alliot-Marie après avoir déjà réussi au quai d’Orsay dans une autre vie. A la surprise générale, il a incarné mieux que quiconque le volontarisme sarkozien en Libye et sur la Syrie. Les deux ex meilleurs ennemis se sont rapprochés et on a cru que l’un serait candidat à la place de l’autre.

 

Cela aurait pu être envisagé. Nicolas Sarkozy incarnait la droite libérale orléaniste alors qu’Alain Juppé incarnait la droite gaullienne bonapartiste. Il pouvait se différencier comme le vieux sage qui prend le relais du jeune fou. Nicolas Sarkozy voyait l’échec s’avancer et sa femme l’encourageait à ne faire qu’un mandat. Il aurait pu le convaincre de se rallier à lui et à l’union de toutes les familles de la droite. Martine Aubry aurait pu être son adversaire et elle avait à son passif la loi antisociale des 35 heures. Par contraste, il aurait gagné facilement.

 

Au final il n’a pas osé se présenter et a même prouvé durant son débat passable contre François Hollande qu’il ne serait sûrement pas passé. Il a montré des signes de velléités d’envie de se présenter à la présidence de l’UMP. Tout le monde sait qu’il ne le fera pas car le passage est bouché par le duo Fillon-Copé. Son intérêt est ailleurs : il ne doit pas cultiver le conflit mais faire le consensus autour de lui en vue d’une opportunité future. Il ne faut pas insulter l’avenir.

 

On lui a déjà trouvé un point de chute : l’Europe. Ce serait un sommet pour cet homme d’Etat qui n’a jamais été chef de l’Etat mais qui mériterait de laisser une trace dans l’histoire. L’Europe est à un tournant de la sienne et doit survivre à une crise qui l’a cruellement affaiblie. Il faut un grand homme et l’actuel président du conseil européen, l’affable belge Herman Von Rompuy, n’a pas le profil. C’était le président fantoche idéal pour ne pas gêner le Merkozy show. Alain Juppé ne sera jamais président de la république. Il peut être président de l’Europe.

 

A 67 ans, il peut être ce vieillard héroïque choisi par le destin pour sauver le peuple en péril du déclin. Il a suffisamment de convictions européennes pour reconnaitre les mérites de Daniel Cohn-Bendit. Il est suffisamment consensuel et compétent pour faire l’unanimité autour de lui. Il a même déjà été pressenti pour devenir président de la commission européenne à la place de José Manuel Barroso, mais il avait encore des choses à faire en France. Après avoir mené la diplomatie française, il pourrait mener la diplomatie européenne face au monde.

 

Il suivrait cette tradition d’hommes politiques qui ont fait l’Europe sans faire la France : Jean Monnet, Robert Schuman, Jacques Delors. Il prendrait place aux côtés de ces glorieux noms de l’histoire européenne : Konrad Adenauer, Paul-Henri Spaak, Altiero Spinelli. Surtout il serait capable de mener l’Europe vers son avenir, qui sera certainement plus fédéral après la crise même si cela ira par étapes. Il devra accélérer le rêve européen qui a trop stagné depuis la chute du mur de Berlin et le traité de Maastricht. Et peut-être qu’il réussira à se faire élire par les citoyens européens, dans la pure tradition gaullienne. Ce sera le président de l’Europe.

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28 juillet 2012 6 28 /07 /juillet /2012 22:45

« On aimerait voter pour le meilleur mais… il ne fait jamais partie des candidats »

 

Kim HUBBARD (1869-1930) – Humoriste américain et pas encore déclaré

 

 

La guerre des chefs continue. Le duel annoncé entre François Fillon et Jean-François Copé aura bien lieu en novembre. Mais d’ici là, d’autres candidats auront joué les trouble-fêtes, tels Manuel Valls et Arnaud Montebourg durant la primaire socialiste entre Martine Aubry et François Hollande. Après NKM, c’est Bruno Le Maire qui fait du bruit. Il n’en fait pas trop habituellement, alors ce sont des élus UMP qui le font à sa place en l’appelant à se présenter.

 

C’est dans les tuyaux. Bruno Le Maire réunit discrètement ses soutiens même si c’est une candidature modérée de plus sur le terrain de François Fillon. Cela fera plus de réserves de voix au 2ème tour, à moins que l’élection ne se joue à la proportionnelle par motions comme au PS. L’ancien ministre de l’agriculture est inconnu du grand public. Peu connaissent les traits fins de son visage aux yeux bleus surmonté de cheveux poivre et sel qui ne laissent pas paraitre son âge - 43 ans - et moins encore ont déjà entendu sa voix de Normandie. C’est pourquoi une candidature à la présidence de l’UMP pourrait préparer une candidature à la vraie présidence.

 

Bruno Le Maire est jeune mais ambitieux. Quadragénaire, énarque, normalien : il est de cette talentueuse génération de bébés Chirac qui veut prendre la relève de Nicolas Sarkozy. Il est avec NKM, Laurent Wauquiez et Valérie Pécresse dans la courte liste de prétendants qui devront se battre entre eux et rabaisser leurs prétentions face à la génération précédente. On l’a déjà vu dans le gouvernement : Bruno Le Maire voulait être ministre de l’économie au départ de Christine Lagarde mais c’est un autre talent en devenir, François Baroin, qui a raflé la mise.

 

Le principal défaut de Bruno Le Maire est qu’il n’est ni médiatisé ni médiatique. D’un naturel discret, il excelle davantage dans les bureaux avec un stylo que dans les meetings avec un micro. Il a d’ailleurs écrit un fort beau livre avec « Des hommes d’Etat », où il raconte la rivalité entre Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin et la vie de l’homme politique coupé de sa famille et jamais en vacances. Depuis il est allé sur le terrain comme ministre de l’agriculture, poste où il s’est plu et a gagné la sympathie des paysans pour les primes ramenées de Bruxelles.

 

Jacques Chirac avait commencé comme ministre de l’agriculture avant d’être président. Mais Le Maire ne sera pas président. Ni président de l’UMP, car la victoire ne peut échapper à l’un des deux favoris. Ni président de la république, car il est en mauvaise position. Bruno Le Maire a la tare d’avoir été directeur de cabinet de Dominique de Villepin. S’il n’a pas poussé le vice jusqu’à suivre son mentor à République solidaire comme Jean-Pierre Grand, les élus UMP ne l’oublient pas. Ils ont dégainé quand il a failli comme chargé du projet présidentiel du parti.

 

Cet espoir de la droite qui ne sait pas combien fait 1 hectare rassemble les soutiens sans avoir de réseau. C’est suspect. La ficelle de la manœuvre de Jean-François Copé est trop grosse. Le secrétaire général cherche seulement à affaiblir François Fillon avant de lancer sa campagne, sachant que les jeunes poulains qu’il incite à se lancer ne lui feront pas d’ombre. Du moins pas pour l’instant. Nul doute qu’ils rêvent tous d’une défaite en 2017 pour avoir la main en 2022.

 

On n’en est pas là. Pour l’heure, Bruno Le Maire fait parler de lui dans le microcosme mais celui-ci ignore que les candidats qu’il invente n’ont pas la côte auprès du peuple. Gaston Defferre était le candidat idéal de la démocratie en 1965. Michel Rocard était le favori de la gauche en 1979. DSK était le rêve américain de la France en 2011. C’est pareil pour les petites frappes qui font soudain les vedettes. Michel Noir, Michelle Alliot-Marie, Rama Yade : on rêve.

 

Bruno Le Maire n’est pas un tocard et mérite mieux que d’être maire. Mais pas de là à être président. Comme d’autres, il a vocation au mieux à être 1er ministre. Pour cela, il faudrait un gouvernement et donc une équipe solidaire à l’UMP. C’est le problème et aussi la solution : face à tant d’ambitions déclarées, il serait dommage qu’un seul homme sorte vainqueur de la guerre des chefs, dans la division générale. Comme ils ont tous les mêmes opinions et tous faim de hochets et d’honneurs, l’idéal serait de les réunir dans un bureau national de tous les talents qui travaillent ensemble à la reconquête. Et pourquoi pas un triumvirat Copé-Fillon-Le Maire ?

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28 juillet 2012 6 28 /07 /juillet /2012 00:58

« En affaires, l’important est de prendre un parti, quel qu’il soit »

 

Jean-Baptiste SAY (1767-1832) – Economiste français et pris à partie

 

 

Il est parti en cavalier seul, en omettant de passer par la concertation que les socialistes considèrent désormais comme l’alpha et l’oméga de chacune de leurs décisions. Benoit Hamon a ajouté sa contribution en vue du prochain congrès du Parti socialiste pour élire un nouveau 1er secrétaire. Le ticket Ayrault-Aubry pensait avoir tué tout débat dans la gauche de gouvernement mais c’est un ministre qui a rompu le calme plat. En 2008 déjà, celui qui n’était alors qu’un petit député européen sans influence était le troisième homme du congrès de Reims entre Martine Aubry et Ségolène Royal. Il a soutenu la première et gagné le poste prisé de porte-parole du PS.

 

Il est obligé d’en passer par là. Avec l’économie sociale et solidaire, Benoit Hamon a hérité d’un petit ministère qui est presque une insulte au rang qu’il a acquis dans le parti. Il a juste un petit défaut : il est le n°2 de Martine Aubry et cela ne passe pas chez le président. Il est trop à gauche pour le social-démocrate modéré François Hollande. Il n’est pas assez tolérant, pas assez avenant et pas assez souriant pour être à l’avant d’un parti qui ne veut plus faire peur.

 

Il n’a pas l’air comme ça, mais il cache bien son jeu. Son personnage est aussi fermé et austère que sa personnalité est ouverte et drôle. Il est devenu une star auprès des jeunes grâce à ses tweets personnels où il parle du petit copain de sa fille de 5 ans. C’est dans le monde virtuel qu’il dévoile son humour et dans une autre vie qu’il prend des responsabilités, comme quand il fut président du MJS, le mini-PS. Entre temps il a mal tourné et s’est mis à chasser les renégats.

 

Il veut prendre le parti. Il sait qu’il n’a aucune chance, cette année au moins. Le consensus entre les anciens éléphants est de mise et les éléphanteaux ne pourront toujours pas leur traîner dans les pattes. La gauche de la gauche n’est pas favorite est un hollandais devrait prendre le contrôle du parti. Plus royaliste que le roi, ce sera même Ségolène Royal. Sans vote et par acclamation. Mais là encore, Benoit Hamon voit plus loin. Son parti-pris, ce n’est pas de prendre le parti en 2012. C’est de prendre position pour le prendre en 2017, ou plus tard.

 

La gauche a eu une drôle d’idée : signer un pacte de non-agression pour en finir avec les conflits. Cela ne fait pas rire la droite qui est en pleine guerre des chefs, et pourtant la mort des débats internes est toujours annonciatrice de défaites. La machine à perdre veut liquider les querelles de personnes. Mais cet irénisme qui caractérise les moments de victoire fragilisera ce parti formé autour de courants. Les écuries aux mains des caciques vont sortir de leur léthargie.

 

En 1981, François Mitterrand avait placé Lionel Jospin 1er secrétaire et l’avait associé à toutes ses décisions lors de déjeuners à quatre à l’Elysée. En 1988, le PS n’avait pas existé dans la campagne du président. En 1997, Lionel Jospin avait reproduit ce qu’il avait appris en plaçant François Hollande à la tête du parti pour vanter et vendre ses décisions. En 2002, la gauche était partie divisée car sa première formation avait été trop molle pour faire respecter la discipline. En 2012, François Hollande est trop faible pour imposer son candidat. En 2017, ce vide d’autorité pourrait lui être fatal si le parti devenait l’organe d’opposition au gouvernement.

 

Martine Aubry a juré qu’elle a assez travaillé et qu’elle ne partira pas à l’assaut d’un nouveau mandat. On voit mal pourquoi on la croirait. Elle n’a plus la mairie de Lille et elle ne supportera pas longtemps la politique molle de cette grande feignasse de François Hollande. Toute déclaration de candidature serait une déclaration de guerre. La crise reviendrait au PS comme au congrès de Rennes de 1990 où les listes de Lionel Jospin et de Laurent Fabius avaient fait match nul à cause du système proportionnel du bureau national du PS. Il encourage les motions, même celle de Benoit Hamon. Le président en est conscient mais reste confiant.

 

Car pour gagner à ce petit jeu, il faut des réseaux au PS. Voilà ce qui manque à Benoit Hamon, qui est isolé et esseulé dans un parti dont les écuries royaliste, fabiusienne et strauss-kahnienne sont pourtant en pleine recomposition. A l’instar de Jean-François Copé à droite qui en recueille aujourd’hui les fruits dans sa course aux soutiens, il devrait approfondir cette tâche au lieu de donner un coup d’épée dans l’eau. C’est un travail en Hamon, est-on tenté de dire.

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