« Qui a confiance en soi conduit les autres »
HORACE (65 - 8 av. JC) - Poète romain et sûr de lui
On a beaucoup insisté sur les caractères opposés de Nicolas Sarkozy et de François Hollande. De profils politiques proches (anciens chefs de leur parti, bons communicants, la cinquantaine) à part leur voie d'accès au métier (le local contre l'administration), leurs personnalités sont l'exact inverse l'une de l'autre. Le président sortant est fougueux, expansif et sûr de lui. L'impétrant candidat est posé, réservé et en manque de confiance en lui.
François Hollande doute souvent, ce qui n'est jamais bon pour un homme politique et encore moins pour un président de la république censé diriger sans trembler la cinquième puissance du monde. Mais c'est un vrai modeste qui cache ce handicap par un sens de l'humour au-dessus de la moyenne qui le rend très sympathique. Tous les hommes politiques jouent un rôle public pour ne pas avoir à trop dévoiler leur personne privée. Le sien, c'est celui du rigolo.
Ce manque de confiance en lui est peut-être aussi un excès de confiance dans les autres, dont il pense au contraire du président actuel que leurs avis sont utiles. Une qualité pour un président. D'où son goût légendaire pour la synthèse, le meilleur moyen de donner raison à tous et de ne se mettre personne à dos. Même si en mixant les avis de tout le monde, les modérés et les extrêmes, on en arrive souvent à une soupe informe et difficile à digérer.
Or cela l'a aussi fait rater des opportunités dans sa carrière politique, que ce soit la campagne pour le oui au référendum de 2005 ou la candidature aux présidentielles de 2007. La politique a horreur des demi-portions et des demi-mesures, elle veut des avis tranchés. Or François Hollande est un monument de modération et de mesure. C'est ce qui agace le plus chez lui. A trop ménager la chèvre et le chou, ce qu’il dit n'a plus aucun sens tant c’est insipide.
Au contraire d'un Nicolas Sarkozy qui se lit comme un livre ouvert, François Hollande ne prend jamais les gens de front. Pour dire ce qu'il a à dire, il contourne et il manœuvre. D'où des discours où il ne dit rien à vous désespérer de la politique, comme le faux suspense de sa déclaration de candidature. C'est ce qui le fait tant détester chez les caciques du PS : ses précautions oratoires et sa fausse mollesse qui cachent en fait un fin limier et un grand stratège.
La stratégie et la méthode sont toujours les deux béquilles de ceux qui doutent trop d’eux-mêmes pour faire confiance à leurs seules jambes. Il ne croit pas en son instinct naturel ou en ses intuitions, alors il planifie tout à l'avance et ne laisse rien au hasard. Quand il a décidé de mettre en œuvre une tactique, il ne s'en détourne pas, quitte à devenir rigide. Quand on lui demande son avis et que ce n'est pas le moment de le dire, il remet ça aux calendes grecques.
C'est son grand défaut. Comme il ne se fait pas assez confiance pour pouvoir librement improviser, il joue le nez collé à sa partition sans s'adapter au jeu de l'adversaire. Comment réagira-t-il quand Nicolas Sarkozy dégainera ses meilleures cartes ? Il esquivera, au risque de rester prostré en réaction ou de laisser le champ libre au président. Alors pour se rassurer, il a adopté une stratégie pépère de pantouflard, celle du président normal qui a du bon sens.
Après tout, après tant de présidents si sûrs d'eux et dont les résultats inspiraient si peu confiance, ne faudrait-il pas lui accorder le bénéfice du doute ? Car après tant d’échecs, se remettre souvent en question et être exigeant envers soi-même sont autant de bénéfices du doute que les français attendent de leur président. Et exigeants, ils le seront sans aucun doute.