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21 février 2012 2 21 /02 /février /2012 10:07

« Qui a confiance en soi conduit les autres »

 

HORACE (65 - 8 av. JC) - Poète romain et sûr de lui

 

 

On a beaucoup insisté sur les caractères opposés de Nicolas Sarkozy et de François Hollande. De profils politiques proches (anciens chefs de leur parti, bons communicants, la cinquantaine) à part leur voie d'accès au métier (le local contre l'administration), leurs personnalités sont l'exact inverse l'une de l'autre. Le président sortant est fougueux, expansif et sûr de lui. L'impétrant candidat est posé, réservé et en manque de confiance en lui.

 

François Hollande doute souvent, ce qui n'est jamais bon pour un homme politique et encore moins pour un président de la république censé diriger sans trembler la cinquième puissance du monde. Mais c'est un vrai modeste qui cache ce handicap par un sens de l'humour au-dessus de la moyenne qui le rend très sympathique. Tous les hommes politiques jouent un rôle public pour ne pas avoir à trop dévoiler leur personne privée. Le sien, c'est celui du rigolo.

 

Ce manque de confiance en lui est peut-être aussi un excès de confiance dans les autres, dont il pense au contraire du président actuel que leurs avis sont utiles. Une qualité pour un président. D'où son goût légendaire pour la synthèse, le meilleur moyen de donner raison à tous et de ne se mettre personne à dos. Même si en mixant les avis de tout le monde, les modérés et les extrêmes, on en arrive souvent à une soupe informe et difficile à digérer.

 

Or cela l'a aussi fait rater des opportunités dans sa carrière politique, que ce soit la campagne pour le oui au référendum de 2005 ou la candidature aux présidentielles de 2007. La politique a horreur des demi-portions et des demi-mesures, elle veut des avis tranchés. Or François Hollande est un monument de modération et de mesure. C'est ce qui agace le plus chez lui. A trop ménager la chèvre et le chou, ce qu’il dit n'a plus aucun sens tant c’est insipide.

 

Au contraire d'un Nicolas Sarkozy qui se lit comme un livre ouvert, François Hollande ne prend jamais les gens de front. Pour dire ce qu'il a à dire, il contourne et il manœuvre. D'où des discours où il ne dit rien à vous désespérer de la politique, comme le faux suspense de sa déclaration de candidature. C'est ce qui le fait tant détester chez les caciques du PS : ses précautions oratoires et sa fausse mollesse qui cachent en fait un fin limier et un grand stratège.

 

La stratégie et la méthode sont toujours les deux béquilles de ceux qui doutent trop d’eux-mêmes pour faire confiance à leurs seules jambes. Il ne croit pas en son instinct naturel ou en ses intuitions, alors il planifie tout à l'avance et ne laisse rien au hasard. Quand il a décidé de mettre en œuvre une tactique, il ne s'en détourne pas, quitte à devenir rigide. Quand on lui demande son avis et que ce n'est pas le moment de le dire, il remet ça aux calendes grecques.

 

C'est son grand défaut. Comme il ne se fait pas assez confiance pour pouvoir librement improviser, il joue le nez collé à sa partition sans s'adapter au jeu de l'adversaire. Comment réagira-t-il quand Nicolas Sarkozy dégainera ses meilleures cartes ? Il esquivera, au risque de rester prostré en réaction ou de laisser le champ libre au président. Alors pour se rassurer, il a adopté une stratégie pépère de pantouflard, celle du président normal qui a du bon sens.

 

Après tout, après tant de présidents si sûrs d'eux et dont les résultats inspiraient si peu confiance, ne faudrait-il pas lui accorder le bénéfice du doute ? Car après tant d’échecs, se remettre souvent en question et être exigeant envers soi-même sont autant de bénéfices du doute que les français attendent de leur président. Et exigeants, ils le seront sans aucun doute.

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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 08:26

« Il est un temps de se moquer et un temps que l'on puisse se moquer de vous »

 

Jean COCTEAU (1889-1963) - Ecrivain français et tel est pris qui croyait prendre

 

 

Le 10 mai 1981, François Mitterrand dit à ses disciples : « Profitez-en car vous ne verrez plus jamais ça ». La gauche au pouvoir sous la Vème République, le moment était historique. Un pays en liesse comme jamais depuis la Libération, tout heureux de changer de président en attendant peut-être de « changer la vie ». C’est l’une des deux dates qui ont le plus marqué la vie politique de François Hollande, comme il le confiait lors de son discours du Bourget.

 

L’autre date est un souvenir beaucoup moins heureux. Le 21 avril 2002, Lionel Jospin est éliminé dès le 1er tour par Jean-Marie Le Pen. Date historique également, peut-être non plus ne le verra-t-on plus jamais. Ce fut un séisme dans l’histoire politique française et une humiliation pour le Parti socialiste, sanctionné pour sa gestion du pays au gouvernement et sanctionné par la multiplication des candidatures à gauche.

 

Le 21 avril est passé au registre des dates noires de l’histoire nationale et de l'imaginaire collectif. Evidemment car la qualification du FN faisait passer la France pour un pays raciste et xénophobe auprès des pays étrangers mais surtout auprès d’elle-même. Le fascisme était passé. Jusqu’à quand persistera-t-on dans cette posture schizophrène qui consiste à considérer le FN à la fois comme un parti diabolique et comme un parti légal ?

 

Car tant que l’on tiendra à l’égard de ce parti un discours mou de condamnation morale et pas un discours fort de disqualification de ses propositions économiques et sociales, alors il continuera à jouer les victimes et à attirer le vote des mécontents. Réagir au moindre propos tendancieux de l’un de ses dirigeants ne fait que renforcer son écho médiatique. Au contraire, il faudrait le laisser se dédiaboliser ce qui en le banaliserait et lui retirerait son attrait.

 

Le 28 mars 2004, suite à l’écrasante défaite de l’UMP aux élections régionales où elle ne gagna qu’en Alsace et laissait toutes les autres régions au PS, l’actuel 1er ministre François Fillon analysait froidement la situation en popularisant à chaud l’expression de « 21 avril à l’envers ».

 

Bien qu'excessive, la comparaison est valable car de nouveau le peuple avait exprimé un vote-sanction, une humiliation publique étant le meilleur moyen de montrer au gouvernement que « c’est la rue qui gouverne », cette France d’en bas silencieuse qui a le droit de vote.

 

Le 21 avril est ainsi devenue une date synonyme de grande humiliation pour le parti qui la subit. Ses dirigeants doivent alors se cacher tandis que le parti rival ricane. On se souvient de Nicolas Sarkozy parlant de Lionel Jospin à travers le 1er ministre espagnol José Luis Rodriguez Zapatero : « Il n’est peut-être pas très intelligent. Moi, j’en connais qui étaient très intelligents et qui ne sont pas allés au second tour de la présidentielle ». Et paf dans les dents.

 

L’ironie du sort, c’est que le président sortant pourrait lui-même être victime d’un 21 avril. Poisson d’avril crédible sachant que la droite a de nouveau coulé aux élections régionales de 2010, ne gagnant aucune nouvelle région en France métropolitaine. Si bien que plusieurs sondages donnaient début 2011 Marine Le Pen devant Nicolas Sarkozy. Certes la tendance s’est depuis inversée et l’écart s’est même creusé.

 

Mais en bonne fille de son père, la candidate FN, actuellement à 20% d’intentions de vote, se souviendra que les sondages en 2002 n’accordaient que 12% à son paternel avant qu’il n’obtienne ses 16,9%. Elu un 6 mai et voulant être réélu le 6 mai, Nicolas Sarkozy pourrait aussi connaitre son 21 avril. Ce sera le 22 avril 2012. Avant même d’avoir revu un homme de gauche élu à l’Elysée, le 21 avril que l’on voulait ne jamais revoir aura déjà sonné et résonné.

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17 février 2012 5 17 /02 /février /2012 08:10

« Si j’étais roi, je me méfierais des as »

 

Tristan BERNARD (1866-1947) – Dramaturge français et bon joueur de cartes

 

 

En 2007, François Bayrou ne fut que le troisième homme. Arrivé troisième du 1er tour des élections présidentielles avec 18,5% des voix, il avait passé son tour au moment de donner une consigne de vote entre les deux finalistes Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal. On n’a jamais su pour qui il a personnellement voté, et beaucoup lui ont reproché de s’être défilé au moment où il aurait pu faire basculer le sort de l’élection. Il était potentiellement faiseur de roi.

 

Qui ne dit mot consent. Son abstention a validé de facto la victoire de Nicolas Sarkozy, l’électorat du Modem ayant plutôt voté pour la droite par penchant naturel. Il aurait peut-être suffit d’une recommandation inverse pour faire tout changer, mais comme le disent les élus qui rechignent à s’engager, un candidat éliminé n’est pas propriétaire du vote de ses électeurs.

 

On ne peut pas dire que François Bayrou ait été récompensé de ce silence. Alors que toutes ses troupes à l’UDF ont fait campagne en faveur du candidat UMP et sont ensuite allés à la soupe du Nouveau Centre, le béarnais s’est retrouvé seul avec sa garbure, victime même d’une alliance entre l’UMP et le PS pour le faire battre aux élections municipales à Pau.

 

C’est une constante dans l’histoire des élections présidentielles sous la Vème république. L’élection bascule souvent sur le choix ou le non-choix d’un candidat éliminé. En 1965, Jean Lecanuet apporte son soutien à De Gaulle et assure sa victoire, tout comme Edouard Balladur avec Jacques Chirac en 1995. En 1981, ce dernier apporte un trop faible soutien « à titre personnel » à Valéry Giscard d’Estaing ce qui vaut désaveu et précipite sa défaite.

 

C’est pourtant lui qui en 1974 le fait élire en le choisissant dès le 1er tour contre le gaulliste Jacques Chaban-Delmas. Jacques Chirac sait bien l’importance des faiseurs de roi : en 1988, il est battu faute d’accord durant l’entre-deux-tours avec Jean-Marie Le Pen. Toujours dans le coup, il a même essayé d’être faiseur de roi en 2012, bien que retiré de la vie politique, en ayant apporté un franc soutien à son copain de terroir François Hollande.

 

Mais revenons plutôt à François Bayrou. En 2012, il ne devrait être que le quatrième homme, si l’on en croit les sondages qui ne le créditent que de 12% d’intentions de vote. Prévision comparable à celles de 2007 à la même époque, ce qui ne l’empêcha pas d’obtenir l’excellent résultat que l’on sait. Alors prenons de la distance par rapport aux sondages, qui donnent François Hollande largement vainqueur avec 57% au 2ème tour, et refaisons les comptes.

 

Avec François Hollande (33%), Jean-Luc Mélenchon (8%) et Eva Joly (2%), la gauche n’aurait que 43% des voix, minimum historiquement bas. La droite en aurait donc 57%, ce qui est exactement l’inverse de ce que prédisent les sondages de 2ème tour, mais avec un Nicolas Sarkozy fragilisé (25%) par rapport à 2007 (31%) qui devrait compter sur le soutien de François Bayrou (12%) et de Marine Le Pen (20%) pour faire le plein de voix à droite.

 

Comme cette dernière ne donnera aucune consigne de vote, François Bayrou serait de nouveau le faiseur de roi. Mais son électorat se reportera au moins pour moitié sur François Hollande, alors même que 8 des 20% de Marine Le Pen fera de même. Tout s’explique alors. François Hollande : 33+8+2+6+8=57%. Nicolas Sarkozy : 25+6+12=43%. CQFD.

 

On comprend donc que l’élection se jouera sur le rejet ou non de Nicolas Sarkozy chez ces électorats censés le rallier. Un jeu de vases communicants. C’est pourquoi l’UMP ménage le plus possible le candidat centriste. Mais même si cela évoluera d’ici le 6 mai, la morale de cette histoire est que les vrais faiseurs de roi sont quand même les électeurs, et c’est heureux.  

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