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3 février 2012 5 03 /02 /février /2012 07:21

« La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens »

 

Carl Von CLAUSEWITZ (1780-1831) – Théoricien militaire et grand va-t-en-guerre 

 

 

Top ! Je suis un homme politique dans l’opposition depuis deux législatures mais je vais certainement gagner facilement les prochaines élections. Mon adversaire hésite à se présenter car sa popularité est au plus bas et son bilan face à la crise n’est pas bon. Personnalité peu charismatique et qui revient de loin, je mène une campagne sur le thème du changement où je ne m’étends pas trop dans les détails de mon programme. Je suis… Je suis…

  

Et non, perdu ! Je suis Mariano Rajoy, président du Parti populaire espagnol, et j’ai largement gagné les dernières élections après huit ans d’opposition et sans préciser une seule de mes propositions pour résoudre la crise. Il faut dire que le parti socialiste m’y a bien aidé, laissant le chômage et la dette publique s’envoler, au grand mécontentement de la population.

  

Fini de jouer. Si vous aviez plutôt pensé à François Hollande, c’est normal. La crise économique actuelle, la plus grave depuis la dernière guerre, renverse tout sur son passage, à commencer par les gouvernements. Dans ce contexte, la stratégie des challengers est facile puisque le peuple est souvent prêt à leur laisser sans contrepartie les clés du pouvoir, pourvu qu’il y ait du changement et un nouveau cartel de généraux, même de gauche, à la tête du pays.

 

Ceci, François Hollande l’a bien compris. Il sait qu’il n’aura pas à forcer et que le rejet du gouvernement actuel est suffisant pour lui assurer une victoire en mai. Il faut juste remplir les formalités de base de la campagne et laisser du temps au temps.

 

Pas insurmontable pour ce fin stratège, grand manœuvrier et roi de la combine. Mais plus que sa réputation de filou, c’est sa manie de ne jamais rien laisser au hasard qui le définit le mieux. Cet homme planifie tout, comme sa candidature qu’il a murie plus de deux ans durant. Son plan de chef de bureau pour battre DSK était prêt et il n’a même pas eu besoin de le sortir.

 

Son plan pour battre Nicolas Sarkozy est déjà en marche. Toujours à la manœuvre, il sait que c’est le doigté qui fera la différence, celui-là même dont il pense son adversaire dépourvu. Tout se jouera dans le ton : être serein, responsable et à l’écoute. « Aimer les gens quand d’autres aiment l’argent » : les français n’aiment pas Sarkozy, il en sera l’exact contraire. C’est le rôle qu’il va jouer et les français y croient déjà. C’est celui d’un bon candidat.

 

Mais pour être un bon président il lui faudra être davantage qu’un expert en petites manœuvres. Etre le capitaine que la France recherche dans la tempête de la crise, pas un boy scout. La politique est un combat et elle réclame des chefs de guerre, pas des chefs de camp.

 

Pour cela, François Hollande va devoir nous surprendre. On connait surtout de lui son goût pour la synthèse et son horreur du conflit. Ses réponses à l’eau tiède qui vous font douter de la fermeté de ses convictions et de la sincérité de ses engagements. Il serait dommage qu’un candidat qui a tant planché sur sa stratégie mette tout son plan à l’eau en donnant l’impression d’arriver sans aucune idée si ce n’est celle de duper les français.

 

Enfin, il devra répondre aux attaques quand son adversaire - ne disons pas ennemi - ouvrira les hostilités en Napoléon aux petits pieds. Ce sera projet contre projet, à armes égales, et l’on verra alors si François Hollande s’y connait vraiment en stratégie. Quand la guerre sera officiellement déclarée.   

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2 février 2012 4 02 /02 /février /2012 07:18

« Donnez-moi le droit de ne pas avoir d’opinion »

 

Roland BARTHES (1915-1980) – Sémiologue et ni pour ni contre

 

 

Les sondages font désormais partie de notre quotidien. Chaque élection génère un jeu des pronostics où les instituts tentent de prédire l’avenir et le résultat final. Et où les commentateurs jouent les accusateurs publics le soir des résultats s’ils se sont trompés. On pense évidemment à l’exemple de 2002 où personne, pas même ces mêmes commentateurs, n’avait réellement pris au sérieux l’hypothèse d’une présence de Jean-Marie Le Pen au 2ème tour.

 

Les sondages sont l’objet de critiques récurrentes, surtout de ceux à qui ils ne sont pas favorables. Ce fut le passe-temps favori de François Bayrou en 2007 et l’argument de dernière minute de Ségolène Royal aux dernières primaires socialistes pour remobiliser ses partisans. Or les gens ont tendance à voter pour celui qui est en tête dans les sondages car cela leur offre le plaisir d’une victoire par procuration, ce que le jargon sondagier nomme « effet bandwagon ».

 

Qu’importe que ceux à qui cet effet profite ne s’en plaignent en revanche jamais. Par exemple la même Ségolène Royal qui sortit gagnante des primaires socialistes en 2006 n’eut rien à redire sur ces enquêtes qui lui donnaient une large avance et du coup une belle légitimité au sein du PS en vue des présidentielles. Michel Rocard, amer, notera que « les élections de 2007 furent les premières où les sondages ont entièrement déterminé l’issue du scrutin ».

 

Or les partis ont l’habitude de suivre ces chiffres pour voir si leurs candidats sont dans le rythme. Par exemple, les verts n’ont pas hésité en 2002 à retirer d’un coup de pied leur candidat Alain Lipietz pour le remplacer au pied levé par Noël Mamère. Avec succès, à méditer pour 2012. Mais compte tenu de l’impératif démocratique de garantir le libre-choix de l’électeur, la publication de sondages est donc interdite deux jours avant chaque élection.

 

Mais le mal est déjà fait à cette altitude. Il vient moins de l’orgie sondagière de la campagne - qui en dépit des critiques est souvent fiable - que du carnaval d’enquêtes de popularité qui émaillent les cinq années précédant chaque élection. Elles sont un danger car elles font le tri entre les candidats qui ont un sex appeal électoral et les autres, sans que les questions (« Avez-vous une opinion positive de… ») n’impliquent forcément un vote futur.

 

Les sondages font donc l’élection en amont, dans le choix des participants à la compétition. Ce sont eux qui ont poussé tant de candidats malheureux à se présenter : Michel Rocard, Edouard Balladur, Dominique Strauss-Kahn… Or personne ne prend le temps de dire qu’ils ne donnent que la tendance du jour et pas le résultat du vote qui aura lieu dans trois ans. Mais ayant popularisé le vote de tous les jours, les sondages sont devenus de véritables oracles.

 

La France est tombée dans cette frénésie du panel, publiant chaque année plus de 500 enquêtes d’opinion, record du monde. Le gouvernement aussi, qui en a plus abusé qu’usé. Il est alors amusant de se rappeler les critiques adressées par Nicolas Sarkozy à Pierre Giacometti lorsqu’au soir de la défaite d’Edouard Balladur en 1995 il accusa les sondages d’avoir placé son mentor trop haut sur sa chaise à porteurs, démobilisant son électorat trop sûr de sa victoire.

 

Aujourd’hui Nicolas Sarkozy est plutôt en déambulateur tant sa côte de popularité, ce plébiscite de tous les jours, se traîne dans les bas-fonds. Des chiffres qui ont donné des idées à droite où se multiplient les candidatures, ce qui pourrait favoriser un 21 avril à l’envers.  

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1 février 2012 3 01 /02 /février /2012 11:29

« Il y a des occasions où il vaut mieux perdre que gagner »

 

PLAUTE (254-184 avant JC) – Auteur latin et philosophe dans la défaite

 

 

La politique est une affaire de personnes avant d’être une affaire de programmes. Et la présidence de la république est le trophée qui génère le plus de jeux d’appareils dans les partis, que ce soit comme ces dix dernières années au PS ou peut-être comme les dix prochaines années à l’UMP. En cas de défaite de Nicolas Sarkozy, François Fillon et Jean-François Copé entreraient en effet en concurrence, et l’ironie veut qu’ils aient à faire campagne pour l’éviter.

 

Les manœuvres existent dans tous les partis et Europe Ecologie – Les Verts ne déroge pas à la règle, bien qu’historiquement il ait toujours rejeté tout carriérisme chez ses dirigeants. Il se signale même par sa capacité à innover, ses primaires ayant vu s’affronter deux personnalités de la société civile totalement étrangères au métier politique, Nicolas Hulot et Eva Joly. Le succès de celle-ci, naturalisée et convertie à l’écologie sur le tard, a d’ailleurs pu surprendre.

 

Ceci explique sûrement cela, à savoir la mauvaise campagne qu’elle mène jusqu’ici. En choisissant une néophyte, EELV a pris le pari de la candeur et est en train de le perdre. Plus que les difficultés à trouver un accord avec le PS, ce sont les propositions décapantes de la candidate qui ont effarouché les suiveurs, que ce soit le défilé civil du 14 juillet ou le jour férié pour chaque culte religieux. Sans compter cet accent qui écorche les oreilles des plus délicats.

 

Aujourd’hui sous les 3% dans les sondages, Eva Joly - qui fait la sourde oreille - est en route pour une déroute finalement bien prévisible. Les candidats de la société civile parachutés en politique peinent toujours en effet à intérioriser les règles du jeu politique, même les plus injustes. Songeons aux échecs de Coluche en France ou de Youssou N’Dour au Sénégal.

 

C’est dommage car ce désastre risque de stopper net la belle ascension de l’écologie ces dernières années en France, que ce soit dans les urnes avec le score historique des élections européennes de 2009 (16,28%) ou dans le débat public. L’intérêt pour la question du nucléaire après Fukushima a montré à quel point la société française est devenue réceptive, ce qui n’était pas gagné en 1974 quand René Dumont obtenait seulement 1,32% des voix aux présidentielles.

 

C’est aussi dommage car les verts compteraient en Daniel Cohn-Bendit un candidat susceptible de remuer les foules, mais Dany ne veut pas en entendre parler. Alors c’est à la 1ère secrétaire Cécile Duflot qu’il revient de tirer les ficelles. Pourquoi ne s’est-elle pas présentée alors que la voie paraissait a priori dégagée ? Sûrement par calcul politique. Trop jeune d’une législature cette année, 2017 sera sans doute comme pour Copé le bon moment pour le faire.

 

Or elle est bien consciente que les verts n’ont pas souvent brillé dans cette élection où le vote utile joue à plein. Une candidate autrement mieux dotée qu’Eva Joly comme Dominique Voynet n’avait obtenu en 2007 que 1,57% des suffrages. Alors autant se concentrer sur les élections intermédiaires et locales, comme Cécile Duflot semble vouloir le faire à Paris.

 

2012 sera donc une année de transition en attendant des jours meilleurs. Une stratégie qui peut paraitre irrationnelle et que pourtant de nombreux partis ont déjà suivi par le passé : la SFIO en 1969 avec le ticket perdant Defferre-Mendes France (5,01%), le PC en 1974 en ne présentant pas de candidat ou en 1988 en présentant André Lajoinie (6,76%), le PS en 1995 avec la candidature de « témoignage » de Lionel Jospin… Mais attention à la déculottée !

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