« La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens »
Carl Von CLAUSEWITZ (1780-1831) – Théoricien militaire et grand va-t-en-guerre
Top ! Je suis un homme politique dans l’opposition depuis deux législatures mais je vais certainement gagner facilement les prochaines élections. Mon adversaire hésite à se présenter car sa popularité est au plus bas et son bilan face à la crise n’est pas bon. Personnalité peu charismatique et qui revient de loin, je mène une campagne sur le thème du changement où je ne m’étends pas trop dans les détails de mon programme. Je suis… Je suis…
Et non, perdu ! Je suis Mariano Rajoy, président du Parti populaire espagnol, et j’ai largement gagné les dernières élections après huit ans d’opposition et sans préciser une seule de mes propositions pour résoudre la crise. Il faut dire que le parti socialiste m’y a bien aidé, laissant le chômage et la dette publique s’envoler, au grand mécontentement de la population.
Fini de jouer. Si vous aviez plutôt pensé à François Hollande, c’est normal. La crise économique actuelle, la plus grave depuis la dernière guerre, renverse tout sur son passage, à commencer par les gouvernements. Dans ce contexte, la stratégie des challengers est facile puisque le peuple est souvent prêt à leur laisser sans contrepartie les clés du pouvoir, pourvu qu’il y ait du changement et un nouveau cartel de généraux, même de gauche, à la tête du pays.
Ceci, François Hollande l’a bien compris. Il sait qu’il n’aura pas à forcer et que le rejet du gouvernement actuel est suffisant pour lui assurer une victoire en mai. Il faut juste remplir les formalités de base de la campagne et laisser du temps au temps.
Pas insurmontable pour ce fin stratège, grand manœuvrier et roi de la combine. Mais plus que sa réputation de filou, c’est sa manie de ne jamais rien laisser au hasard qui le définit le mieux. Cet homme planifie tout, comme sa candidature qu’il a murie plus de deux ans durant. Son plan de chef de bureau pour battre DSK était prêt et il n’a même pas eu besoin de le sortir.
Son plan pour battre Nicolas Sarkozy est déjà en marche. Toujours à la manœuvre, il sait que c’est le doigté qui fera la différence, celui-là même dont il pense son adversaire dépourvu. Tout se jouera dans le ton : être serein, responsable et à l’écoute. « Aimer les gens quand d’autres aiment l’argent » : les français n’aiment pas Sarkozy, il en sera l’exact contraire. C’est le rôle qu’il va jouer et les français y croient déjà. C’est celui d’un bon candidat.
Mais pour être un bon président il lui faudra être davantage qu’un expert en petites manœuvres. Etre le capitaine que la France recherche dans la tempête de la crise, pas un boy scout. La politique est un combat et elle réclame des chefs de guerre, pas des chefs de camp.
Pour cela, François Hollande va devoir nous surprendre. On connait surtout de lui son goût pour la synthèse et son horreur du conflit. Ses réponses à l’eau tiède qui vous font douter de la fermeté de ses convictions et de la sincérité de ses engagements. Il serait dommage qu’un candidat qui a tant planché sur sa stratégie mette tout son plan à l’eau en donnant l’impression d’arriver sans aucune idée si ce n’est celle de duper les français.
Enfin, il devra répondre aux attaques quand son adversaire - ne disons pas ennemi - ouvrira les hostilités en Napoléon aux petits pieds. Ce sera projet contre projet, à armes égales, et l’on verra alors si François Hollande s’y connait vraiment en stratégie. Quand la guerre sera officiellement déclarée.