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26 octobre 2012 5 26 /10 /octobre /2012 22:08

« En France, ce que pense la province importe autant que ce que pensent mes jambes »

 

Heinrich HEINE (1897-1956) – Poète allemand et au ton provincial

  

 

Le président a parlé. C’était dans un pompeux amphithéâtre de la Sorbonne et c’était pour ne rien dire. François Hollande devait annoncer l’acte III de la décentralisation censé à la fois annuler la réforme territoriale de Nicolas Sarkozy et donner une nouvelle impulsion aux collectivités locales. Mais c’est un acte manqué. Sa feuille de route est une feuille volante et ses mesures sont des mesurettes. Il n’a pas osé supprimer d’échelons et leur a même rajouté des compétences. Il a peu proposé d’orientations et laissé cette mission à un observatoire de trop. Il a supprimé le conseiller territorial et ne l’a remplacé que par un report des élections à 2015.

 

La droite avait la partie facile en dénonçant une manœuvre pour gagner du temps alors qu’elle ne fait qu’alléger un calendrier électoral surchargé en 2014. C’est la gauche qui a le plus fait historiquement pour la décentralisation en France, un mérite qu’on ne lui enlèvera pas. Elle a fait les lois de décentralisation créant les conseils régionaux et élargissant les attributions des conseils généraux en 1982. Elle a fait les communautés d’agglomérations et les communautés de communes en 1992. Elle a juste oublié de définir clairement qui faisait quoi et quand.

 

C’est un exploit quand on songe que la France reste un pays effroyablement centralisé. L’Etat est tout et rien ne se fait malgré lui. Cette logique totalitaire est même très présente chez les socialistes, que le conflit entre la première gauche jacobine de François Mitterrand et la deuxième gauche girondine de Michel Rocard a longtemps divisés. C’est pourquoi la droite a repris le flambeau et a beaucoup fait depuis dix ans. C’est elle qui a amélioré la démocratie locale avec sa loi de 2004. C’est elle qui a voulu sauver le système avec sa grande loi de 2010.

 

La France des collectivités locales est bien malade. Le mille-feuilles administratif est incompris et la répartition des compétences est incompréhensible. Sauf pour les quémandeurs de subventions, qui pointent à tous les guichets et profitent des cofinancements croisés entre institutions. Lancée pour réduire le coût du nombre d’élus, la réforme de la droite visait aussi à clarifier les compétences pour qu’elles ne soient pas partagées mais exclusives. Chacun dépense dans son domaine. C’est cette avancée que les socialistes ont dans leur grande candeur abrogée.

 

La gauche n’a voulu sacrifier personne, même pour sauver tout le monde. Elle détient une grande partie des collectivités locales et ne pouvait se mettre à dos ses présidents, même si elle peut tous les perdre en 2015. A défaut de supprimer, il aurait fallu clarifier. D’une part les compétences en attribuant clairement l’économie aux régions et intercommunalités et le social aux départements et communes. D’autre part les quantités en regroupant les 36000 communes et les 22 régions pour qu’elles collent à la réalité. Soit faire une refonte qui soit une fusion.

 

Mais la clarification de la carte territoriale se heurtera toujours au même problème tant qu’on continuera à créer des structures. Le moindre syndicat d’initiative aura toujours droit à la parole et au regard puisqu’il a compétence sur son territoire. Il est empêché par ses moyens mais peut empêcher. Il n’est jamais bon signe de lancer des Etats généraux. Cela annonce soit une révolution soit une crise. Le problème de la décentralisation, c’est aussi que les collectivités sont trop petites et trop peu structurées pour exercer convenablement leurs compétences.

 

La question de l’argent sera forcément mise sur la table. Après avoir tout mis sur le dos de l’Etat cinq ans durant, les collectivités socialistes vont pouvoir réclamer au gouvernement les moyens financiers pour utiliser leurs pouvoirs. Celui qui commande paie, mais surtout celui qui paie commande. Les collectivités locales ne vivent pas de leurs impôts que la suppression de la taxe professionnelle a appauvris. Elles doivent taxer soit les habitants soit les entreprises, jamais les deux en même temps. Elles vivent donc des dotations de l’Etat et des fonds de péréquation alimentés par les plus riches. Elles réclament donc peu pour ne pas perdre le peu qu’elles ont.

 

Le plan mal fagoté de François Hollande n’est pas allé jusqu’à un tel degré de courage. Il n’a qu’incanté que la région financera l’innovation et le département paiera la dépendance. Avec les sous de l’Etat, instigateur et victime de la décentralisation. Ce n’est plus un sujet central si on en juge par l’inconsistance des orientations annoncées. L’Etat propose et les collectivités disposent, mais le compte n’y est pas. Dans la république des copains et des coquins, il manque deux idées. Las bassins de vie, qui rendent cohérents les territoires où s’exerce l’administration. Et les chefs de file, qui coordonnent les projets et rationalisent la dépense publique.

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25 octobre 2012 4 25 /10 /octobre /2012 23:22

« Au tennis, on sait si on est un gagnant ou un perdant »

 

Chris EVERT (1954) – Tenniswoman américaine et du bon côté du filet

  

 

Tout le monde n'a pas suivi le débat entre François Fillon et Jean-François Copé car tout le monde ne s’intéresse pas aux débats internes à la droite française. Cela n’empêche pas de faire un débat sur le débat et de noter ses hauts et ses bas. Comme prévu, il n’y a pas eu d’affrontement et le combat de boxe ne s’est pas fini par un KO. Mais si ce match nul a été nul pour celui qui était neutre, ce débat n’aura pas été dénué d’intérêt pour l’électeur de l’UMP qui va voter. A défaut d’avoir usé leurs poings, les deux rivaux peuvent être départagés aux points.

 

Comme prévu, les journalistes ont voulu titiller les deux candidats. François Fillon sur son bilan, puisqu’il était le 1er ministre de la France durant cinq ans. Il s’est plutôt bien défendu, allant même sur le terrain de prédilection de l’adversaire en parlant immigration. Jean-François Copé sur sa posture, surtout sur sa position qui consacrerait la droitisation. Il a eu du répondant en prouvant que lui au moins avait du courage mais les questions étaient trop agressives pour le valoriser. Avec ce scénario attendu et ce plan balisé, l’aîné a pris le dessus. Fillon 1, Copé 0.

 

Il a été question d’adjectifs pour définir les deux hommes. Rassembleur et fuyant pour François Fillon, fonceur et arrogant pour Jean-François Copé. L’un a assumé une position de chef d’Etat et de président avant l’heure, presque trop généraliste et on se demande s’il ne s’est pas trompé d’auditoire en parlant plus à la France qu’au parti. L’autre a affiché son courage et sa pugnacité, répondant tel qu’on le connait et sans esquive aux questions sur le pain au chocolat. Entre la souplesse lisse et la précision concrète, le choix est vite fait. Fillon 1, Copé 1.

 

Une ombre planait sur le plateau, celle de Nicolas Sarkozy. Les deux belligérants étaient censés ouvrir le devoir d’inventaire mais c’est plutôt à une critique du bilan catastrophique de François Hollande qu’ils se sont livrés. Jean-François Copé allant même jusqu’à moquer la barboteuse du ministre du redressement productif, un lapsus parfaitement calculé. N’ayant pu dévier le débat et fuir plus longtemps leur responsabilité, ils ont joué au concours du meilleur sarkozyste. François Fillon a rappelé qu’il l’était un fan de la première heure car il était le plus vieux. Jean-François Copé ne pouvait pas renier le président qu’il a rallié si récemment et dont il ménage si dangereusement le retour. A ce petit jeu, la prime est à l’ancien. Fillon 2, Copé 1.

 

Les deux prétendants ne se sont pas écharpés de la soirée, tout simplement parce qu’ils n’ont pas parlé des mêmes sujets. Durant le grand oral de la première partie, François Fillon a parlé de déficit et Jean-François Copé de laïcité. Durant le vrai débat de la seconde partie, ils se sont parlés mais de choses différentes ou de sujets qui ne pouvaient pas les fâcher. Refusant de répondre aux questions tendancieuses ou de se laisser porter sur le terrain de la polémique, ils n’ont pas dit le mot de trop tant redouté depuis celui de Martine Aubry sur la gauche molle. A l’image de cette poignée de main à la mi-temps des interviews, il y a eu égalité. Imparfaite.

 

Ce débat a révélé la stratégie de campagne des deux candidats. La droite a une grande responsabilité vis-à-vis des français alors que la gauche multiplie les mauvais choix et nous mène dans le mur. Face à la morosité ambiante, sa mission historique est d’incarner une autre voie même si tout le monde ne sera pas convaincu par le match du soir. François Fillon a décidé de taire les choses et de distiller de l’eau tiède pour ne pas diviser. Jean-François Copé préfère les mettre sur la table et crever les abcès qui paralysent le pays. Il n’y a pas photo. Fillon 2, Copé 2.

 

Ce choc tant attendu aura surtout été un duel de personnalités. Car sur les idées, il n’y a pas un cheveu d’écart et seule la différence de coiffure permettrait au quidam de les départager. Or leurs styles sont très opposés. François Fillon est consensuel et fourbe et a l’expérience du 1er ministre qui connait les palais. Jean-François Copé est franc et brutal et a l’expérience du maire de Meaux qui connait le terrain. Ils sont complémentaires, d’ailleurs ils ont promis qu’ils feraient la paix une fois passé le 18 novembre et qu’ils aideraient le meilleur à gagner en 2017. Mais entre la peur du conflit et la culture du résultat, il n’y a pas d’ex aequo. Fillon 2, Copé 3.

 

Jeu, set et match. Ce débat était une première et beaucoup y verront une dernière tant la compétition et le combat ont été absents de la scène. S’il n’y a pas eu de gagnant et qu’il n’y avait rien à gagner, ce débat n’est pas perdu pour tout le monde. Il permet aux deux candidats de rester en vie, puisqu’ils étaient avant tout venus pour ne pas perdre. Avec une réserve. Non seulement Jean-François Copé a prouvé la pertinence de la notion de racisme anti-blanc, mais en plus François Fillon a fléchi à un moment bien précis du débat : quand il a peiné à expliquer qu’il était pour la stratégie du ni-ni du secrétaire général vis-à-vis du FN et du PS alors qu’il soutenait le contraire en 2011. C’est là qu’il faudra appuyer, puisque c’est là que ça fait mal. 

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24 octobre 2012 3 24 /10 /octobre /2012 22:15

« Ceux qui vivent sont ceux qui luttent »

 

Victor HUGO (1802-1885) – Ecrivain français et lutteur gréco-romain

  

 

Cela n’a échappé à personne. Dans la guerre des chefs qui se joue pour la présidence de l’UMP, chacun des deux candidats compte ses soutiens. François Fillon rallie ses ex ministres. Cela va de Valérie Pécresse à Laurent Wauquiez en passant par François Baroin, pourtant bon ami du secrétaire général. Jean-François Copé rallie les ex collaborateurs de l’ancien président. Cela va de Brice Hortefeux à Henri Guaino en passant par Geoffroy Didier, de la France forte.

 

Les sarkozystes votent Copé. N’était l’étrange soutien de Christian Estrosi à l’ancien 1er ministre, tous les confrères de l’association des amis de Nicolas Sarkozy appuient le maire de Meaux dans sa conquête du parti. Tous pour les mêmes raisons. Ils l’ont vu à l’œuvre durant la campagne présidentielle, à soutenir activement le candidat de la droite et à organiser le parti de main de maître. Ils ont aimé son courage et son dévouement. L’aiglon Jean Sarkozy a même sous-entendu qu’il était dommage que tous n’aient pas autant mouillé la chemise. S’il le dit…

 

Le peuple de droite n’a pas renoncé à son Nicolas. C’est pourquoi il apprécie la posture de Jean-François Copé qui célèbre l’héritage sarkozyste au lieu de s’en distancier. Il incarne la droite volontaire qui a gagné en 2007 et personne ne lui reproche de faire campagne sur les thèmes qui ont faire perdre la droite décomplexée de 2012. Les militants savent que le racisme anti-blanc n’est qu’un chapitre repris par les médias sur tout un livre et que le pain au chocolat n’est qu’une demi-phrase piochée dans un discours d’une heure et demi. Ils savent tout cela.

 

Au lieu de la prudence de la droite modérée, il faut du courage. Jean-François Copé est le mieux placé pour mener la reconquête des territoires et la refondation de l’UMP car il prend des risques et donne de sa personne. Il est professionnel, productif et proactif. Il met tous les sujets qui fâchent sur la table cat il vaut mieux être précurseur que suiveur. Il a des convictions. Les sondages des sympathisants ne lui sont pas favorables et ceux qui ont intérêt à ce que rien ne change votent pour son adversaire. Chacun ses goûts. Les sarkozystes seront toujours avec ceux qui font, osent et agissent. Pour 2014 ou 2017, Jean-François Copé le meilleur candidat.

 

Cette guerre des chefs est une drôle de guerre. Une guerre de position, sans mouvement et avec à peine plus de batailles d’opinion. Elle ne fait pas de blessés. Les deux prétendants ne sèment pas la division et n’affirment pas de différence de valeur ou de programme. Ils notent seulement des écarts de personne et de personnalité. François Fillon est un séguiniste social issu du local parachuté sur une terre d’élection en or. Jean-François Copé est un chiraquien pur jus émancipé de l’énarchie qui se bat sur une circonscription difficile. L’issue du scrutin pourrait être aussi drôle. Avec une élection à deux candidats, il est facile de tomber sur un score à 50-50 si la guerre est déclarée ou à 80-20 si tout le monde croit deviner l’improbable vainqueur.

 

Le moins drôle, c’est que cette élection rejoue le duel fratricide de 1995 entre Edouard Balladur et Jacques Chirac. Le premier a d’ailleurs apporté son soutien à François Fillon, ce qui ne porte pas forcément chance. La chiraquie est bien représentée avec Jean-François Copé, qui comme son vieux maitre croit davantage au terrain qu’aux prévisions hasardeuses des sondages. L’ironie du soir est que le clan sarkozyste va faire gagner le chiraquien historique. C’est normal.

 

Le projet qu’incarne François Fillon ne colle pas avec ce que doit être et faire l’UMP. Vaguement social et tendancieusement eurosceptique, il ferait doublon avec le nouveau parti centriste de l’UDI. Il condamnerait la droite à ne jamais faire de polémique contre la gauche pour ne pas décevoir ceux qui croient qu’on peut débattre sans se fâcher. Jean-François Copé incarne au contraire la volonté. Il sait que la descente se fait très vite et que la remontée est toujours difficile. Il a déjà tout calculé pour gagner les élections présidentielles dans cinq ans.

 

On ne sait pas pour qui votera ou voterait Nicolas Sarkozy. On sait juste qu’il a menacé François Fillon de faire relater publiquement son manque d’engagement lorsqu’ils formaient le tandem qui a gouverné la France s’il continue à remettre autant en cause l’héritage. Il reste des soutiens de poids à rallier. Alain Juppé a dit qu’il ne choisirait pas mais on sait que François Fillon n’aime pas les chiraquiens et qu’ils le lui rendent bien. Bruno Le Maire a tenté de jouer sa carte mais il devrait finir par se rappeler que le 1er ministre ne lui a pas accordé le ministère de l’économie qu’il désirait tant. Xavier Bertrand attend 2017 et devrait comprendre que le sarkozysme qu’il prétend servir a déjà choisi son camp. Il vote pour l’aide de camp.

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