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8 novembre 2014 6 08 /11 /novembre /2014 08:24

« Vous voulez que j’aille à la télévision en pyjama ? »

 

Charles DE GAULLE (1890-1970) – Ancien président et pas télégénique

 

« Depuis deux ans et demi je me cramponne ». C’est peut-être la phrase qui restera de l’émission consacrée au mi-mandat de François Hollande. C’est pas facile d’être président : le constat d’échec est touchant de sincérité. Y a-t-il encore un pilote dans l’avion ? Y a-t-il un patron à la tête de la maison France ? C’est à la fin de la foire qu’on compte les bouses et à la fin du bal qu’on paie les musiciens : mais n’est-il pas déjà temps de tirer un bilan du quinquennat, alors qu’on n’est qu’à la moitié ?

 

Cette émission dont personne n’attendait grand-chose aura tout de même réussi à décevoir. Ni bilan ni projet, François Hollande n’a fait aucune annonce mais s’est contenté de décliner de nouveau ses propositions sur le pacte de responsabilité. Il prétend encore laisser en 2017 une France « plus grande, plus forte, plus juste » qu’il ne l’a trouvée en 2012, n’ayant pas hésité à égratigner plusieurs fois le bilan de son prédécesseur Nicolas Sarkozy qui était l’absent le plus présent du plateau télévisé.

Comme à son habitude, François Hollande s’est vanté d’avoir engagé de nombreuses réformes dont aucune n’a abouti. Celui qui prétend réformer et renforcer le pays n’a entrepris pour l’instant que des travaux non finis, laissant une France en chantier voire en ruine. « Un président de la république travaille pour son successeur ». La phrase est belle, mais peu crédible dans la bouche de celui qui critique ceux qui sont « candidats à tout » et qui dit ne pas savoir s’il va ou s’il veut se représenter.

 

« Il y a un seul président, beaucoup de candidats ». Même cette phrase est fausse car François Hollande n’a pas été à la hauteur de sa fonction ce soir. Son discours, trop techno et sans âme, n’a pas réenchanté le rêve français qu’il vantait en 2012. Il est incapable de faire le récit de la crise que traverse notre pays et de la manière dont il pourrait en sortir par le haut. Son programme (emplois verts, tablettes numériques, réforme du service civique) est digne d’un président de conseil général et non d’un président de la république, mais peut-être aurait-il dû le rester ? Pipeau pipeau.

 

J’ai fait la tournée de tous les bistrots…

 

Il a même parfois plus ressemblé à un conseiller de Pôle Emploi qu’à un chef d’État comme lorsqu’il a feint de prendre note de la situation de cette sexagénaire ou de ce jeune diplômé au chômage. La rencontre avec les français a eu au moins le mérite de révéler les échecs de sa politique. Échec sur la jeunesse, à laquelle il n’a que des emplois aidés à proposer alors qu’il en avait fait sa priorité en 2012 et qu’elle fuit à l’étranger telle l’exode des protestants après la révocation de l’Édit de Nantes.

 

Les journalistes n’ont pas été tendres avec lui. Thierry Demaizières l’a interrogé sur sa part intime et « son attitude pudique dans un quinquennat si impudique ». Gilles Boulleau l’a enjoint d’assumer « ses chômeurs ». Yves Calvi l’a interpellé d’un « on se demande parfois si vous comprenez votre politique ». Les français n’ont pas été en reste. L’entrepreneuse d’Armentières l’a rudoyé : « la maison brûle […] ce n’est pas comme ça qu’on va résoudre le problème du chômage ». Ce format d’émission était un risque mais il l’a assumé. Et il n’est pas tombé dans le panneau de la pensée unique médiatique d’une annonce sur la proportionnelle, qui aurait été malvenue.   

 

L’émission marque pourtant un pas de plus dans le déclassement et la trivialisation de la fonction présidentielle. Jadis le Général de Gaulle rechignait à se mettre en pyjama devant les français, or il ne reste même plus le pyjama à François Hollande tant il a été mis à poil sous prétexte de se mettre à nu. Mauvais client au jeu du portrait personnel, réticent à fendre l’armure, obligé de se justifier sur sa cravate, il est apparu humain, trop humain. Ni excessif ni exceptionnel, mais l’inverse d’un François Mitterrand qui réussissait à la fois à être plus chébran et plus solennel.

 

On retiendra quelques enseignements politiques de la soirée. Déjà qu’il n’y aura plus d’impôts supplémentaires, ni nouvelle taxe ni hausse de taux, d’ici la fin du mandat. Affaire à suivre. Puis que la gauche bête et naïve a fait son apostasie du socialisme, le président voyant enfin que « ce sont les entreprises qui créent les richesses et les emplois ». Cela va mieux en le disant. Puis que la montée du FN - qui lui fait penser aux années 1930 (joli point Godwin) - est due au fait que les français doutent d’eux-mêmes et pas de leur président et que sortir de l’euro revient à sortir de l’histoire. Et cette phrase mythique : « j’ai fait la tournée de tous les bistrots ». Et les bars à putes ?

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7 novembre 2014 5 07 /11 /novembre /2014 09:04

« Celui qui ne voit l‘Afrique qu’une seule fois dans sa vie mourra borgne »

 

Yasmina KHADRA (1955) – Écrivain algérien et saint d’Afrique

 

Ça bouge en Afrique ! Le pouvoir de Blaise Compaoré, président du Burkina Faso depuis 27 ans, a été renversé en un jour par la révolte populaire. Il a été remplacé par le colonel Isaac Zida, comme si l’armée était condamnée à garder le monopole du gouvernement en Afrique. Le pays devrait rester instable un petit moment. Peut-être qu’une intervention de la France sera nécessaire. Elle en a pris l’habitude.

 

La France s’est replacée dans la course au leadership du continent avec ses récentes opérations au Mali et en Centrafrique. La thèse officielle est que ces États instables ont besoin d’aide. On serait rassuré d’apprendre qu’il s’agit en fait de défendre nos intérêts économiques, notamment notre approvisionnement en matières premières comme l’uranium pour le nucléaire et Areva. La France a trop longtemps renoncé à la Realpolitik, préférant les bons sentiments voire le renoncement à ses intérêts.

Longtemps la Françafrique a été un gros mot. Un symbole de corruption et de l’argent illégal qui finançait en secret nos campagnes politiques, à l’image des valises de Robert Bourgi livrées par Omar Bongo à Jacques Chirac ou des liasses présumées de Mouammar Kadhafi prétendument remises à Nicolas Sarkozy. Il ne fallait donc plus toucher à l’Afrique, quitte à laisser la Chine s’y installer à notre place alors que la France avait toujours été la puissance dominante sur le continent noir.

 

Mais sous le prétexte de la guerre contre le terrorisme du Djihad et avec l’excuse d’une intervention concertée avec les forces africaines de la CDEAO, la France a pu de nouveau y mettre les pieds et utiliser efficacement son armée. La dernière fois qu’elle était intervenue, c’était en Côte d’Ivoire en 2005. Depuis la France oubliait que c’est en étant plus grande qu’elle qu’elle est la France, intervention en Libye omise.

 

Après la guerre, le développement ?

 

La stratégie de la francophonie pour garder la main sur nos anciennes colonies a échoué. Puissance moyenne petite qui joue encore les gros bras, la France devait reprendre les armes pour continuer à jouer un rôle en Afrique. Le clientélisme et le copinage qui ont cours entre notre pays et cet empire reconstitué ont des relents néocoloniaux aux yeux des populations livrées à la misère. Il faudra donc trouver une suite aux opérations militaires pour que notre retour ne soit pas annihilé.

 

Pour éviter des révoltes contre les fidèles dirigeants placés par la France, notre pays devra consentir à une vraie politique de co-développement avec les pays d’Afrique, qui ne semble pas de mise vues nos propres difficultés dues à la crise mais que l’afflux d’immigration provenant du Maghreb et d’Afrique noire a toujours justifié. Le temps que cette approche très théorique trouve des financements et des apôtres, la France fait donc la guerre pour garantir une stabilité dans ses arrière-cours.

 

Avec peu de moyens il est vrai, 4500 hommes au Mali et 1600 en Centrafrique avec un budget de la défense qui dégringole chaque année. Il faut pourtant se donner les moyens de nos ambitions, d’autant plus que le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian craint que ces conflits ne durent des années. Et se multiplient, tant la théorie des dominos est transposable à toutes les contrées comme l’est l’afghanisation, cette guérilla urbaine qui devient un bourbier où on s’enfonce. Isabelle ne répond plus.

 

Or la résilience de l’opinion publique française a des limites. Elle aime bien quand son pays fait la guerre, à condition que cela ne fasse pas de morts chez ses soldats. La mort d’un des leurs la semaine dernière au Mali participe à la démoralisation des troupes, paradoxe plus forte à l’arrière qu’au front. Comme si les marchands de canon se décourageaient plus vite que les poilus envoyés au front en 1914.

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6 novembre 2014 4 06 /11 /novembre /2014 14:57

« La vérité n’est jamais amusante. Sans cela, tout le monde la dirait »

 

Michel AUDIARD (1920-1985) – Dialoguiste français et menteur éhonté

 

Nous sommes ce 6 novembre au mi-mandat du quinquennat de François Hollande. Putain, deux ans et demie ! Comment la France va-t-elle tenir jusqu’en 2017 ? Le président est tellement carbonisé que sa démission a déjà été envisagée et qu’une dissolution pourrait être annoncée. François Hollande pense qu’il peut encore s’en sortir, redresser la situation économique et pouvoir se présenter en 2017. Il est bien le seul. Il y a un gouffre entre la réalité et ce qu’il raconte. Voilà les deux versions.

 

La réalité : un mi-mandat calamiteux

 

La réalité est catastrophique et son mi-mandat calamiteux car la France est encore plus dans la crise en 2014 que quand François Hollande en a héritée en 2012. La crise économique s’est aggravée avec la croissance qui ne repart pas, le chômage qui explose et les déficits qui s’accumulent. Mais il n’y a pas que cela. Le président a ajouté une crise politique avec son impopularité dans les sondages, une crise morale avec ses écarts de vie privée et une crise sociale avec la colère des français.

 

Pourquoi sa politique ne marche pas ? Sûrement parce qu’il a menti en 2012. « Moi président de la république », c’était du baratin. Il a minimisé la crise, surestimé ses capacités et maximisé l’antisarkozysme. Il croyait négocier plus de croissance - son mot talisman - avec l’Allemagne et ce fut « nein ». Il s’est fait élire par la gauche or il a pris un virage à droite avec le pacte de responsabilité. Il n’a donc plus de majorité car il n’a plus la majorité de sa politique. Les frondeurs le condamnent à l’échec.

 

Le changement c’était pas maintenant. Dès le début du mandat, François Hollande a gâché ses 100 jours en ne faisant rien là où il aurait dû faire une grande réforme fiscale. Mais il ne croyait pas à son programme. C’est pourquoi l’encadrement des loyers, la taxe à 75 % et la sortie du nucléaire sont passés à l’as. La seule promesse qu’il a tenue, c’est le mariage pour tous. Belle réussite, puisque cela a contribué à monter les français les uns contre les autres. Voilà pour le bilan. Le chat est maigre.

Ce qu’il raconte : une demi-vérité

 

François Hollande aura certainement une tout autre version à raconter ce soir lors de son émission sur TF1. Une réécriture totale digne d’un storytelling, où il confiera à demi-mot une demi-vérité où ne sera mis en valeur que le verre à moitié plein et non le verre à moitié vide. Il dira que la moitié de son quinquennat du redressement dans la justice fut consacrée à réparer et réformer et que l’autre le sera à préparer et redistribuer. On se demande quoi. À part ponctionner les français, il n’a rien fait.

 

Il dira qu’il aurait dû dire l’état catastrophique du pays en 2012 et qu’il a bien fait de revenir sur les seules bonnes mesures de Nicolas Sarkozy, de la TVA sociale à la défiscalisation des heures supplémentaires en passant par la réforme territoriale. Il dira que c’est à cause de son prédécesseur qu’il n’a pas tenu ses 60 engagements. Et non à cause de son manque de courage à mener les réformes, qu’il se contente de commenter en adepte de la méthode Coué et qu’il est pour l’instant le seul à voir.

 

Nous ne sommes qu’au mi-mandat, à la mi-temps. Nous n’avons donc qu’une demi-vision de ce que sera le bilan du quinquennat de François Hollande. Or la première moitié suffit à notre malheur. Une inversion du chômage ratée qui a tué la confiance des français. Ses couacs et ses machines arrière du pouvoir : entre la concession et la contradiction, il a toujours préféré la moins mauvaise des solutions. Il est temps qu’il se reprenne en main car il en reste peu. Il faut que François Hollande se fixe enfin un calendrier sérieux d’action et de réforme, s’il prétend vraiment les accélérer.

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